1989 est l'année de Michael Chang. Il n'a alors que 17 ans lorsqu'il débute son deuxième Roland Garros, après s'être hissé jusqu'au troisième tour l'année précédente. Jusqu'en huitièmes, tout va pour le mieux pour l'Américain, qui se qualifie avec brio malgré son jeune âge. Et ensuite, le choc. Ivan Lendl, numéro un mondial, se dresse sur sa route. Un triple vainqueur du tournoi. Difficile d'imaginer pire tirage. Et pourtant ce match restera dans les annales. Mené deux sets à rien, Chang s'accroche et revient à égalité. C'est alors que le grand spectacle commence. A 4-3, luttant contre les crampes, Chang tente l'improbable avec son fameux service à la cuillère. Mission réussie, Lendl, totalement surpris, y perd sa concentration et ses nerfs. Mieux encore, le jeune américain se procure une balle de match dans le jeu suivant, sur le service de Lendl. Il choisit alors de se placer... à l'intérieur du court, près de la ligne de service ! Totalement déstabilisé, le Tchécoslovaque y laissera le point et le match. Un deuxième coup de bluff gagnant, un coup de génie. Malgré toute son expérience, Lendl a craqué psychologiquement face à l'ingéniosité adverse. Dans la foulée, Chang remportera le tournoi, devenant à 17 ans et trois mois le plus jeune vainqueur du tournoi. Un record qui tient toujours !
9. Djokovic, si loin, si proche...
Ou comment perdre un match sur des détails. Le vendredi 7 juin 2013, Rafael Nadal et Novak Djokovic se livrent un combat titanesque sur le Philippe Chatrier. Roland Garros est en ébullition. Novak Djokovic a l'avantage, menant 4-6, 6-3, 1-6, 7-6, 4-3 service à suivre. Après 4h02 de match, le Serbe engage à 40-A. Un point rondement mené, l'Espagnol ramène la balle comme il peut, désespérément, en dehors des limites du terrain. Il ne reste plus qu'à conclure par un smash. Ce genre de coups très simples à réaliser, le court étant totalement vide. Et là, c'est le drame. Certainement usé par l'intensité et la longueur du combat, Novak Djokovic réussit correctement son geste - malgré une technique peu académique... mais ne parvient pas à freiner sa course pour finir dans le filet. Stupeur dans le stade. Une chance inouïe pour Nadal de rester en vie. Le Serbe ne passera pas à travers les mailles... du filet, l'arbitre étant intransigeant. Le tournant du match, à n'en pas douter. Le Djoker ne s'en remettra pas. Après avoir cédé son service, c'est le match qu'il laissera quelques jeux plus tard à son plus grand rival.
8. Gaudio, l'inattendu
Que pouvait-on attendre de Gaston Gaudio à l'orée de Roland Garros 2004 ? Qu'il gagne quelques matchs ? Sûrement. L'Argentin avait déjà gagné deux titres sur terre, et il avait atteint en 2002 les huitièmes de finale Porte d'Auteuil. Qu'il gagne le tournoi ? Pas le moins du monde, sauf pour quelques parieurs fous. Cañas, Novak, Enqvist, Andreev, Hewitt et Nalbandian. Aucun ne lui résistera, malgré deux premiers tours délicats. Mais celui qui l'attend en finale est un tout autre morceau. Son compatriote Guillermo Coria est en effet l'un des monstres du moment. Terrien redouté et troisième mondial, il s'avance en grand favori. Coria l'avait d'ailleurs battu trois fois en quatre confrontations. Assumant son statut, Coria mène 6-0, 6-3 face à un Gaston dépassé. C'est alors que le scénario devient fou. Tétanisé par les crampes, la tête de série numéro trois laisse Gaudio revenir à deux manches partout. Malgré la douleur, Guillermo "El Mago" se procure deux balles de match dans le cinquième set. Toutes deux effacées par un Gaston Gaudio chaud comme la braise. Coria ne s'en remettra pas. Se faisant ensuite breaker, il rend finalement les armes, en pleurs. Incroyable renversement de situation. Gaudio peut jubiler, il ne franchira ensuite plus jamais les huitièmes de finale en Grand Chelem. Un sacré coup !
7. Borg, la jeunesse au pouvoir
1974. Bjorn Borg n'a que 18 ans, une seule édition de Roland Garros dans les jambes (huitièmes de finale en 1973) mais le Suédois est déjà tête de série numéro trois du tournoi. Plus jeune joueur du tableau, il remporte ses matchs, dont certains au forceps, pour se hisser jusqu'en finale. Son huitième et son quart de finale, tous deux remportés en cinq sets, seront notamment très disputés. Surnommé Iceborg, en référence au Cyborg, il surprend ses adversaires par des capacités physiques rares pour son âge, mais aussi par un mental qui paraît être à toute épreuve. Il l'avoue lui-même, "tenir le coup Porte d'Auteuil pendant deux semaines relève de l'exploit." Pour sa première finale de Grand Chelem, il affronte l'Espagnol Manuel Orantes. Comme tout Ibère qui se respecte, ce dernier est très à l'aise sur terre battue. Il étouffe ainsi le Suédois deux sets durant, incapable de réagir. Mais l'histoire ne serait pas belle ainsi. Piqué au vif et mené 2-6, 6-7, Borg hausse son niveau de jeu et explose littéralement son adversaire. Le terme "explose" n'est ici pas de trop. Un cinglant 6-0 dans le troisième set est là pour en témoigner. L'exploit semble alors envisageable pour le jeune prodige, d'autant plus que l'Espagnol, pourtant demi-finaliste par le passé à Paris, semble à court physiquement. Borg ne laissera pas passer sa chance. Deux derniers sets rapidement réglés pour une correction finale de 6-1, 6-1. "J'étais le jeune joueur inconnu qui venait défier un des meilleurs spécialistes de la terre battue. Ma victoire au cinquième set m'a acquis le soutien du public pour longtemps." La naissance d'une véritable rock star et l'un des plus grands joueurs de tous les temps.
6. Söderling, LA surprise !
Roland Garros, le jardin par excellence de Rafael Nadal. Un tournoi qu'il a remporté à huit reprises, un des nombreux records que possède l'Espagnol. En neuf éditions à Roland Garros, Rafael Nadal a remporté 59 matchs. Sur un total de... 60 parties disputées ! Une seule ombre apparaît au tableau du taureau de Manacor. Un certain Robin Söderling, un jour de 2009, est venu briser les rêves de titre et de quintuplé du numéro un mondial. Au début du tournoi, alors invaincu sur le central parisien, Nadal semble totalement insubmersible. Comme à l'accoutumée, il remporte ses premiers tours sans soucis, triomphant en trois sets de Daniel, Gabashvili et Hewitt. Se profilent alors les huitièmes de finale et un adversaire à priori largement à sa portée. Le Suédois Söderling, 25e mondial, va en effet disputer son premier huitième de finale en Grand Chelem, à 24 ans. Et sortir le match de sa vie. Services acérés à plus de 220km/h, coups de boutoir, une réussite insolente, et voilà que l'exploit qui paraissait impossible a finalement vu le jour. Enorme coup de tonnerre. Une défaite qui aura aussi un impact psychologique pour Nadal, le public ayant pris parti pour Söderling au cours du match et le sifflant même parfois. Le règne de Roi s'est arrêté, lui qui restait sur 31 matchs et 32 sets consécutifs remportés. Totalement inconcevable.
Publié sur : WeLoveTennis - Moments inscrits pour l'éternité
En 1999, Steffi Graf a déjà tout gagné. 21 titres du Grand Chelem au compteur, numéro un mondiale pendant 377 semaines et surtout détentrice du fameux Grand Chelem en 1988 (remportant l'Open d'Australie, Roland Garros, Wimbledon et l'US Open), tous ces éléments font de l'Allemande l'une des meilleures joueuses de l'histoire du tennis. En 1999, Graf est sur le déclin. Voici deux ans et demi qu'elle enchaîne les blessures et les titres se font plus rares. Ce Roland Garros, qui fut son dernier, sera une quinzaine de résurrection. Alors que le tennis mondial est désormais dominé par Lindsay Davenport et Monica Seles, elle bat successivement ces joueuses en quarts et en demi-finales Pour s'offrir une 30e finale de Grand Chelem, un sommet qu'elle n'avait pas connu depuis sa victoire à l'US Open 1996. Et ce n'est autre que Martina Hingis, numéro un mondiale, qui l'attend pour s'adjuger la victoire. Tout d'abord largement dominée, Steffi Graf va parvenir à renverser la situation. Notamment grâce au soutien du public, qui aura joué un rôle très important dans cette finale. Martina Hingis, qui finira en pleurs, sera même sifflée, à l'issue du match. Roland Garros, le seul tournoi majeur qui manque à la Suissesse, lui échappera encore. Menée 4-6 à l'issue du premier set, Steffi Graf remporte donc Porte d'Auteuil son 22e (et dernier) titre du Grand Chelem, sur le score de 4-6, 7-5, 6-2. Pour l'anecdote, elle annonce à l'issue du tournoi sa liaison avec André Agassi... le vainqueur du tableau masculin. Un couple au sommet !
4. Federer, enfin !
Roland Garros, cette plaie ouverte au palmarès de sa Majesté Roger Federer. Rien ne lui résiste, si ce n'est la Porte d'Auteuil. Rafael Nadal est son pire ennemi. 2009, cela fait quatre ans que l'Espagnol le croise sur sa route, et ne lui laisse que des miettes. En 2006, 2007 et 2008, les deux joueurs s'affrontent en finale. Pour trois sacres du Majorquin. Des défaites qui font d'autant plus mal que le Suisse aurait remporté le fameux Grand Chelem sur une année s'il était victorieux à Roland. Mais 2009 est l'année de Roger. O miracle, Nadal n'est plus là, éliminé à la surprise générale par Robin Soderling. Enfin, la voie du Suisse est libre. Mais il était écrit que jamais le chemin vers la victoire ne serait dégagé. Premier accroc face à Tommy Haas où, mené deux sets à rien, Roger l'emporte au forceps. Après un combat dantesque en demi-finales et une victoire 3-6, 7-6(2), 2-6, 6-1, 6-4 sur Del Potro, l'Helvète retrouve le Philippe Chatrier pour une quatrième finale parisienne. Le fameux Soderling l'y retrouve. La finale sera sans suspense, tant le Suisse sort le grand jeu pour s'offrir enfin ce titre si important à ses yeux. Un ultime coup, la victoire acquise, et Federer fond en larmes sur le court. 6-1, 7-6(1), 6-4. L'Helvète remporte son 14e majeur, un des plus forts émotionnellement. Pour l'histoire, il devient le sixième joueur à remporter au moins une fois chacun des tournois du Grand Chelem. Enfin, Roland Garros est dans sa poche. Enfin !
3. Noah, du soleil comme s'il en pleuvait
En 1983, Yannick Noah arrive à Roland Garros avec un statut de bon joueur de terre battue. Le Français reste en effet sur deux quarts de finale consécutifs Porte d'Auteuil. Tête de série numéro six du tournoi, "Titi" ne part pas en grandissime favori, même s'il arrive le moral gonflé à bloc grâce à deux victoires en tournoi, à Hambourg et Madrid. Mais Noah va tout renverser son passage. Effet de surprise, il jouera sur le fait de ne pas être attendu au tournant. Lors de ses premiers tours, il prend notamment sa revanche sur le Paraguayen Victor Pecci, qui l'avait éliminé deux ans plus tôt. Le grand spectacle commence en quarts de finale. Jouant le tennis de sa vie, dans un match d'une intensité rare où chaque point est joué comme une balle de match, Yannick Noah résiste à Ivan Lendl, ne lui concède qu'un set et file vers le dernier carré. Un des plus grands matchs dans la carrière de l'ex-tennisman désormais chanteur. Dans un duel 100% Tricolore, Roland s'enflamme pour les demi-finales, qui ne seront cependant d'aucun suspense. Un Noah impérial ne laisse que trois jeux (!) à Christophe Roger-Vasselin. Arrive alors la finale tant attendue. Aucun Frenchie n'a remporté Roland depuis 1946, une éternité ! Mats Wilander, tenant du titre et adversaire de Yannick, aimerait bien que cette série perdure. Mais il n'en sera rien. Toute la France, les "50 millions de Noah" comme le titrait L'Equipe, espère un titre du Tricolore. Dans une ambiance survoltée, Noah impose son jeu d'attaque, basé sur de nombreuses montées au filet. Wilander ne peut contrer. 6-2, 7-5, 7-6(3). Une fois la balle de match remportée, Noah se jette, en larmes, dans les bras de son père et de ses proches. L'une des plus belles images du sport français. Une étoile était née... mais qui attend toujours son successeur.
2. Kuerten s'en donne à cœur joie
"Gu-ga, Gu-ga, Gu-ga !" Des ovations à Roland Garros, Gustavo Kuerten en a connu beaucoup. Lorsqu'il arrive Porte d'Auteuil en 2001, le Brésilien est tenant du titre, dans un tournoi qu'il avait déjà remporté par le passé. Le numéro un mondial se présente donc comme le grand favori à sa propre succession. Son premier fait d'armes se déroule en huitièmes de finale, alors qu'il est opposé au modeste américain Michael Russell, quasi-inconnu qui dispute là son premier Roland Garros. A la surprise générale, Kuerten est à côté de la plaque. Empilant les fautes directes, il se retrouve mené deux sets à rien. Et doit même sauver une balle de match. Mais un champion ne meurt jamais, et c'est dans ce genre de moments qu'il se réveille. Revenu dans le match après un troisième set splendide d'intensité, le Sud-Américain sonne la révolte et s'impose après un combat mémorable. C'est alors qu'il dessine un cœur sur le central avec sa raquette. Une image qui fera le tour du monde. "Ce jour-là, j'ai éprouvé quelque chose d'incroyable. Je suis entré en fusion avec le public. C'était magique." Porté par sa réussite, Kuerten se peut s'arrêter en si bon chemin. Kafelnikov et Ferrero ne le stopperont pas. Se dresse alors Alex Corretja, un adversaire qui l'a déjà battu deux fois en cinq rencontres. Montées ravageuses au filet, présence de tous les instants, lifts agressifs... Kuerten produit un tennis de rêve et crucifie l'Espagnol pour s'offrir un troisième Roland, 6-7, 7-5, 6-2, 6-0. Il dessine alors un nouveau cœur sur la terre du Philippe Chatrier. Pour cette fois-ci s'y allonger, exulter et savourer. Guga, un amoureux de Roland Garros.
1. McEnroe, le rêve brisé
1984 est l'année de John McEnroe, numéro un mondial. 82 victoires pour trois défaites en fin de saison, un bilan quasiment parfait. Et pourtant, une de ses défaites restera dans toutes les mémoires. La finale de Roland Garros Lendl-McEnroe reste en effet l'une des plus légendaires du tournoi, de par son niveau de jeu mais aussi à cause d'un scénario fou. L'Américain atteint cette année-là la finale de Roland, un tournoi du Grand Chelem qu'il n'a jamais remporté. Face à lui, Ivan Lendl dit "Le Terrible", numéro deux mondial. Numéro un - Numéro deux. Un duel qui promet, déjà mythique à l'époque. Les deux joueurs se sont affrontés 18 fois, pour dix victoires de McEnroe contre huit pour le Tchécoslovaque. L'avantage psychologique est également pour l'Américain, qui vient de battre Lendl à quatre reprises en 1984 ! De plus, le numéro deux mondial n'a jamais remporté de titre en Grand Chelem, malgré quatre finales, toutes perdues... John McEnroe va donc faire fructifier cet avantage deux sets durant. Aérien, impérial au filet, McEnroe réalise des merveilles sur le court. Il s'envole rapidement au score et mène 6-3, 6-2. C'est alors que la finale s'emballe. Dans une chaleur étouffante, alors que le central bouillonne, McEnroe fatigue peu à peu. L'espoir va changer de camp. Moins précis, faisant plus de fautes, le numéro un mondial s'effondre. Le public prend le parti de Lendl, qui effectue un retour au score incroyable. Celui que Jimmy Connors appelle "Chicken" prend alors la direction des opérations et ne la lâchera plus. 3-6, 2-6, 6-4, 7-5, 7-5. Lendl remporte (enfin) son premier titre du Grand Chelem, aux dépends de l'Américain, qui n'aura jamais été aussi proche de le conquérir. Un rêve brisé.
Ce classement reste subjectif. Nous l'avons établi en essayant de tenir compte tant de la portée de l'événement, ce qu'il en reste dans les mémoires nationale, mais aussi et surtout internationale, et l'émotion qu'il a généré.
Publié sur : WeLoveTennis - Moments inscrits pour l'éternité